Un vendredi soir, lorsque la vie m’a laissée sans abri et que la vulnérabilité a envahi mon esprit, la colère et l’injustice m’ont frappée de plein fouet. J’étais seule avec ma fille, face à l’abîme, et au milieu de ce chaos, une impulsion irrépressible a surgi en moi : prendre ces émotions et les transformer en une œuvre qui célébrerait la force et la liberté que nous portons en nous.

Le fusain est devenu le témoin d’une soirée où la lumière et l’ombre se sont rencontrées, créant un espace d’introspection et de transformation. La scène qui a émergé sur la toile n’était pas une simple représentation, mais une manifestation profonde de ce que signifie être mère : une petite étable, chaleureuse et sûre, habitée par une jument et son poulain. Je n’ai pas choisi cette image par hasard. Ces deux figures représentaient l’architecture de mon lien avec ma fille, un choix conscient qui contrastait avec la possibilité de représenter des animaux plus imposants.

À ce moment-là, je voulais capturer l’essence de ce que signifie être un foyer. Je ne parle pas d’un lieu physique, mais de cette force intérieure qu’une mère est obligée de trouver en elle-même pour protéger et guider son enfant. La jument, dans sa sérénité, incarne la figure maternelle qui, quelles que soient les circonstances, devient le foyer et le refuge de son poulain. Le poulain, connecté à elle par un fil invisible d’amour pur et éternel, reflète la dépendance et la confiance que ma fille plaçait en moi, même lorsque tout le reste semblait s’effondrer.

Je ne saurais dire combien de fois j’ai aiguisé la pointe de mon fusain, mais chaque trait qui donnait vie à ces animaux était imprégné d’un désir profond : que leurs regards transmettent la sécurité d’être bien, d’être en sécurité, malgré tout. J’ai choisi ces chevaux non seulement pour leur symbolisme de liberté, mais parce que leur nature est de courir, d’avancer sans s’arrêter. Un cheval qui ne court pas, qui ne remplit pas son but, est voué au sacrifice. Et c’est ainsi que je me sentais à ce moment-là : obligée d’avancer, de ne jamais m’arrêter, car s’arrêter aurait signifié succomber.

J’aurais pu représenter des figures plus imposantes, mais ces deux chevaux reflètent avec précision notre histoire. La maternité m’a transformée en un être capable de transformer la douleur en joie, de parcourir champs et montagnes sans relâche, rien que pour voir un sourire sur le visage de ma fille. Parce que dans la vie, comme dans cette œuvre, notre pouvoir réside dans notre capacité à nous adapter, à trouver au milieu du chaos une nouvelle opportunité de courir vers nos objectifs, en liberté, sans regarder en arrière.